Édition du dimanche 13 janvier 2008

16 h 30, jeudi 10 décembre, la mer est grosse, la visibilité moyenne, la vedette SNS 212 "Patron Raymond Crouzat", toute rutilante, avec une douzaine d'équipiers à bord, fonce vers un mystérieux rendez-vous. L'émotion, l'impatience se lisent sur les visages tendus des sauveteurs qui scrutent la mer. On est au large de Brescou. Un projecteur s'éclaire dans les vagues sombres.

"Elle" est là, la belle tant attendue, la SNS 157, fendant les flots, superbe ; elle fait le tour de la vieille vedette... Des éclats de rire, entremêlés de larmes se mêlent aux "vivas". Qui escorte l'autre ? Nul ne sait ! Elles ont franchi la passe de Valras, ensemble côte à côte, pour rentrer à quai au port, moment symbolique et fort s'il en ait, attendu depuis cinq ans par les vingt et un sauveteurs de la station valrassienne : 14,80 m de longueur, 4,40 m de large, un habitacle pouvant accueillir jusqu'à trente naufragés et six membres d'équipage, vingt tonnes propulsées par deux moteurs de 450 CV, vingt-cinq noeuds en pleine charge, insubmersible et auto-redressable pourvu d'un équipement pointu de dernière génération, entre autres un système de positionnement et de recherche de bateau.

Construite aux chantiers Bernard, à Lorient, elle a ensuite été équipée à La Seyne-sur- Mer où nos sauveteurs sont allés la chercher faisant trois étapes : Marseille, Port Camargue et Cap d'Agde, où à chaque fois la vedette locale est sortie pour leur faire escorte. « Nous sommes désormais équipés comme les plus grands ports de Méditerranée, indique Patrick Toustou, le président de la SNSM ; c'est un bateau première classe, qui peut affronter des mers difficiles, un outil performant, qui sera appelé à sortir en dehors de son secteur officiel : Gruissan, Cap d'Agde, pour aider les copains qui, par gros temps, ne pourront pas franchir les passes ».

La vedette "SNS 157" sera baptisée le 3 mai prochain, lors des rencontres méditerranéennes de sauvetage. Elle portera le nom de "Patron Armand Bèzes", du nom de ce pêcheur de petit métier, équipier du premier canot à rames, "L'amiral Zédé", puis patron du premier canot à moteur "Guy de Chauliac", « et qui nous a transmis tout son savoir et son expérience sur l'actuelle SNS 212 ».

Paulette Bèzes, sa soeur, attendait d'ailleurs son arrivée toute chavirée d'émotion, près de la capitainerie, à côté de laquelle l'énorme vedette s'est amarrée en place de la "vieille", qui en 25 ans de bons et loyaux services a accompli tant de missions de sauvetage, parfois incroyables et que tout l'équipage s'apprête à voir partir, l'estomac noué et le coeur gros. « Nous espérons pour elle, une retraite prestigieuse ! ».

Le mot de la fin au patron Didier Motis : « On a tous subi des formations intenses ; il faut maintenant la prendre en main ; qu'on mette notre expérience au profit de ce bateau et qu'on arrive à faire corps avec lui, comme on faisait corps avec l'autre... ».

Claude PUECH

Coût de la "SNS 157" près de 700 000 € financés par le conseil régional, le conseil général, la SNSM, l'agglo BM, la CCI, l'agglo la Domitienne, les villes de Valras et Vendres et des sociétés privées.